Potentiels aromatiques, fruit et couleurs intenses au programme du millésime 2023

Pas tous égaux devant les aléas climatiques !

Le début de végétation a été très homogène partout, avec des dates de débourrement revenues à la normale, par rapport à l’an passé.
Le développement du feuillage, relativement rapide, a été suivi d’une très belle sortie sur l’ensemble des vignobles. Le millésime s’annonçait sous les meilleurs auspices.
Mais, à partir du 25 mai, la météo et ses caprices sont venus jouer les trublions, avec une pluviométrie importante et, surtout, continue jusqu’au 15 juin, dans le secteur de l’Entre-deux­-Mers. La durée de ces précipitations a eu d’importantes conséquences au niveau épidémiologique le mildiou y trouvant des conditions idéales à sa prolifération.

Le vignoble du Château Bonnet a été sévèrement touché par les attaques de ce champignon, d’une virulence rarement enregistrée dans notre région. Les cépages rouges ont été les plus impactés (60% de pertes pour les merlots, notamment). Les cépages blancs ont, dans l’ensemble, beaucoup mieux résisté. La campagne phytosanitaire a été particulièrement compliquée, et a demandé une forte implication humaine.
Sur les vignobles de nos autres appellations, du fait d’une pluviométrie mieux répartie, le problème du mildiou ne s’est quasiment pas posé.

Sur le château de Barbe Blanche (en cours de conversion bio), le vignoble a pu être bien mené, avec des traitements en bio bien maîtrisés. Fin août, une très belle vendange s’annonçait. Mais une importante sécheresse (5 mm seulement de précipitations entre le 1er Août et le 30 septembre) est venue compromettre une partie de la récolte (au final, faibles rendements, de l’ordre de 28hl/ha).

L’appellation Pessac-Léognan est, quant à elle, arrivée à la date des vendanges sans soucis particuliers, avec des raisins de très belle qualité et de très beaux volumes.
Si la quantité est très variable d’une appellation à une autre, la grande qualité de ce millésime 2023 est bien une réalité, partout.

La magie aromatique des blancs 2023

Contrairement aux années précédentes, l’été 2023 n’a pas connu de fortes chaleurs. Juillet et août ont été marqués par des nuits relativement fraîches, des journées chaudes mais sans excès. Une telle situation a permis d’obtenir des potentiels aromatiques remarquables, notamment sur les blancs.
Nos sauvignons blancs de Pessac-Léognan nous offrent cette magie aromatique, très intense. L’absence de fortes chaleurs a servi la fraîcheur, autre caractéristique de ce millésime.

Château Bonnet : Toutes les cuves se goûtent très bien et sont très homogènes au niveau qualitatif. Les arômes sont très séduisants, déjà très intenses au niveau du nez. On se retrouve avec plusieurs profils, avec des cuves qui sont très agrumes, d’autres fruits exotiques … Le potentiel aromatique est là et les assemblages promettent d’être particulièrement intéressants.

Château de Cruzeau : Année météorologique calme sur ce domaine, belle qualité, avec de jolis profils aromatiques et des volumes importants (ou tout au moins revenus à la normale).

Château Couhins-Lurton : Les baies ont été ramassées avec une précision d’orfèvre, permettant ainsi de saisir toute la richesse aromatique des raisins produits sur ce terroir d’exception.

Fruits et couleurs intenses pour les rouges 2023

Pour les rouges, nuits fraîches et journées chaudes ont eu le même effet au niveau aromatique mais ont, aussi, eu un impact favorable sur la synthèse des anthocyanes, présents en grande quantité et facilement extractibles …

On se retrouve, ainsi, avec des jus aux couleurs très profondes. Une amplitude thermique relativement limitée a offert à la vigne des bonnes conditions pour la synthèse de tous les composés phénoliques : à ces couleurs intenses et profondes, viennent donc s’ajouter une très belle structure, des nez très fruités et expressifs.
Le très beau mois de septembre a été très favorable aux cabernets sauvignons, qui ont pu arriver à parfaite maturité.

Château Bonnet : La bonne surprise vient ici des cabernets sauvignons, qui malgré leur apparence (tout petits grains, semblables à des myrtilles), donnent des vins très colorés, assez structurés, avec du fruit. Ils se goûtent très bien. Ils devraient donner de jolis Entre-deux-Mers rouges (2023 étant le tout premier millésime de cette A.O.C).

Château de Barbe Blanche : Petite quantité, mais un potentiel qualitatif élevé.

Château de Cruzeau : Première récolte du petit verdot. Celui-ci devrait entrer dans l’assemblage du Château de Cruzeau.

Château de Rochemorin : Les merlots récoltés présentent une belle homogénéité. Les cabernets sauvignons ont atteint une maturité parfaite et présentent une très belle structure. Les cabernets francs sont juste délicieux.

Château La Louvière : Ici, les quelques précipitations de fin de saison ont été particulièrement bénéfiques aux Cabernets. Ceux-ci sont très noirs, avec beaucoup de fruit, sans côté végétal. La structure tannique est bien là, sans rusticité. De très grands cabernets !

Château Couhins-Lurton : Les merlots de Couhins-Lurton présentent des Ph très bas, avec une acidité et une fraîcheur bien équilibrées avec la teneur alcoolique. Modification du palissage et travail du sol intensifié sont autant d’éléments positifs qui se retrouvent aujourd’hui dans les Cabernets sauvignons.

Millésime 2022 : une année atypique, aux faibles rendements mais à la qualité exceptionnelle

De mémoire de vigneron, 2022 aura été une année particulièrement atypique du fait de conditions climatiques extrêmes :

  • Un gel très précoce au printemps (4/6 avril) ayant impacté le vignoble au moment où la vigne démarrait son débourrement, est venu endommager les bourgeons principaux. La plante a refait des bourgeons secondaires avec une grande quantité de grappes, de grains, mais aussi de grappes vides… Une taille hivernale tardive sur les 2/3 de nos vignobles a malgré tout limité les dégâts.
  • À cette situation est venue s’ajouter un long épisode de sècheresse exceptionnelle. Celui-ci a débuté très précocement, dès le mois de mai se prolongeant jusqu’à fin septembre. Le cumul pluviométrique pour les 9 premiers mois de l’année 2022 était de 315/320 mm d’eau contre 600 mm sur une année normale.

Des rendements très bas

De ces conditions météo extrêmes découlent des rendements particulièrement bas. (Entre 30 et 40% de pertes) :

  • Sur les Pessac-Léognan, tant blancs que rouges, rendements tournant autour des 30hl/ha. (À l’exception du Château de Cruzeau, aux terroirs plus argileux, avec des rendements de l’ordre de 42/43 hl/ha) ;
  • En Entre-deux-Mers, au Château Bonnet, tant blancs que rouges, on est à 40hl/ha ;
  • Seul le vignoble de Barbe Blanche tire son épingle du jeu, avec 45-47 hl/ha. Cela s’explique par la taille tardive du vignoble et l’altitude plus élevée de son vignoble.
  • Sur des terrains très argileux, là où les racines de la vigne étaient profondes, les rendements sont un peu meilleurs et la sècheresse a eu moins d’impact.

La vigne réagit aux changements climatiques. Une année de sécheresse exceptionnelle comme 2022, la plante s’est adaptée. Pour résister au manque d’eau, elle a puisé l’eau contenue dans les baies de raisins, à partir du 20 août.

Au 15 août, une pluie, assez conséquente survenue en Pessac-Léognan a été particulièrement salvatrice, donnant un bon coup de fouet à la fin de la véraison et à la maturation.

Un état sanitaire parfait offrant des conditions idéales de vendanges.

Les années se suivent et ne se ressemblent pas … Si 2021 avait été une année difficile sur le plan sanitaire, le millésime 2022 est tout son contraire. L’ensemble des vignobles est arrivé jusqu’au moment des vendanges en parfait état sanitaire.

Une telle situation a offert à nos équipes le luxe de pouvoir choisir avec précision et sans précipitation la date de récolte idéale pour chaque parcelle : un véritable travail d’orfèvre.
Ces dates de vendanges ont été particulièrement compliquées à décider, du fait d’un décalage entre la maturité technologique (taux de sucre, acidité, PH dans le raisin) et la maturité phénolique (maturité de la peau et du pépin). La maturité phénolique a été un peu longue à venir, du fait des conditions climatiques (notamment pour les cépages blancs). La plupart du temps, nos équipes ont fait le pari d’attendre et ce pari a finalement payer. Ces vendanges 2022 ont été particulièrement étalées dans le temps, débutant le 18 août et se terminant le 11 octobre.

Millésime 2022 : un potentiel qualitatif exceptionnel !

Petites quantités certes, mais qualité exceptionnelle en prévision sur l’ensemble de nos propriétés. Le millésime 2022 s’avère extrêmement prometteur.

Les blancs

Les jus sont un peu plus riches en sucre que les années précédentes.
Au niveau degré, au château Bonnet on devrait être aux alentours de 13° au lieu de 12,5° (en année classique).

Les rouges

2022 est sans aucun doute la Grande Année pour les vins rouges : tout est généreux.

Ce type de millésime, très particulier, a demandé une grande précision et beaucoup de finesse en termes d’extraction, notamment en fin de fermentation alcoolique. Le piège serait de tomber dans la sur-extraction. Les vins sont déjà très riches, en tanins, en anthocyanes, en composés phénoliques.

On obtient partout des jus très riches. Les degrés sont légèrement plus élevés que pour une année classique, acidité et fraîcheur sont également au rendez-vous. Du fait de raisins un peu moins juteux (sècheresse oblige), on a un rapport marc sur jus, avec davantage de peau que de jus, ce qui donne des vins particulièrement colorés.

  • Les vins de Château de Barbe Blanche, d’une couleur pourpre presque noire, s’annoncent d’une qualité exceptionnelle.
    Au château de Cruzeau, nos carménères s’annoncent particulièrement réussis…
  • Le vignoble de Rochemorin est sans doute celui qui a le plus souffert de la sècheresse (perte de 40% des volumes). Mais ce terroir nous offre toujours des choses étonnantes : qualitativement, les vins présentent en effet une belle homogénéité, avec de la fraîcheur et un très joli équilibre en bouche.
  • Au château La Louvière, le meilleur des cépages est également au rendez-vous. Les vins sont ici très colorés, très fruités, avec des degrés très classiques et relativement modérés (13°5, sans doute une spécificité liée au terroir).
  • Pour les rouges de Château Couhins-Lurton, 2022 est synonyme d’excellence. Là encore, un terroir d’exception, la vinification en petits contenants sont des atouts majeurs.

Au jeu des comparaisons, 2022 pourrait rivaliser avec le millésime 2010, particulièrement réussi à Bordeaux… mais avec des rendements moins généreux, mais qui ont sans aucun doute joué sur la très grande qualité de ses vins.